
Optimisation fiscale de la prestation compensatoire : capital ou rente, que choisir?
-La prestation compensatoire est un élément essentiel du règlement financier lors d'un divorce. Elle vise à compenser la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie des époux. Si ses modalités ont été considérablement assouplies par les réformes successives (loi du 26 mai 2004 relative au divorce et loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice), ses implications fiscales restent complexes et méritent une attention particulière.
1. LA FISCALITÉ DE LA PRESTATION COMPENSATOIRE EN CAPITAL
Les formes du versement en capital
Le versement en capital peut prendre plusieurs formes :
- Versement d'une somme d'argent
- Attribution de biens en propriété
- Attribution d'un droit temporaire ou viager d'usage, d'habitation ou d'usufruit
Ce capital peut être versé en une seule fois ou de manière échelonnée sur une période maximale de 8 ans (voire plus en cas de circonstances exceptionnelles).
Le régime fiscal pour le débiteur : la réduction d'impôt
Le débiteur qui s'acquitte d'une prestation compensatoire en capital bénéficie d'une réduction d'impôt égale à 25% des sommes versées, dans la limite de 30 500 euros. Cette réduction est soumise à plusieurs conditions :
- Le versement doit intervenir dans les 12 mois suivant la date à laquelle le jugement de divorce est passé en force de chose jugée.
- La valeur du capital doit être expressément fixée dans la convention de divorce homologuée par le juge, dans le jugement de divorce ou dans la convention de divorce par consentement mutuel sous signature privée contresignée par avocats.
Cette réduction d'impôt s'applique quelle que soit la forme du versement en capital (somme d'argent, attribution de biens ou de droits), ce qui constitue un élargissement important depuis la loi de 2004.
Le régime fiscal pour le bénéficiaire
Les sommes reçues au titre d'une prestation compensatoire en capital ne sont pas imposables pour le bénéficiaire lorsqu'elles sont versées dans les 12 mois suivant le divorce. Cette exonération constitue un avantage significatif par rapport au régime des rentes.
Le cas particulier du versement échelonné
Lorsque le capital est versé sur une période supérieure à 12 mois, le régime fiscal change :
- Pour le débiteur : les versements effectués après les 12 premiers mois sont déductibles du revenu global.
- Pour le bénéficiaire : ces mêmes versements sont imposables au titre des pensions alimentaires.
La libération anticipée du capital échelonné
Le débiteur peut décider de se libérer par anticipation du solde du capital restant dû, sans intervention du juge. Dans ce cas :
- Les sommes versées sont déductibles de son revenu global
- Elles sont imposables entre les mains du bénéficiaire
- La réduction d'impôt n'est pas applicable (contrairement au cas de la conversion judiciaire d'une rente en capital)
2. LA FISCALITÉ DE LA PRESTATION COMPENSATOIRE SOUS FORME DE RENTE VIAGÈRE
Le principe de la rente viagère
Depuis la loi de 2004, la prestation compensatoire sous forme de rente viagère n'est fixée qu'à titre exceptionnel, lorsque l'âge ou l'état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins. Le juge peut également prévoir une prestation mixte, combinant un capital initial et une rente viagère.
Le régime fiscal pour le débiteur
Les versements effectués au titre d'une rente viagère sont déductibles du revenu global du débiteur, sans limitation de montant ni de durée. Cette déduction s'applique dans les conditions prévues au 2° du II de l'article 156 du Code général des impôts.
Le régime fiscal pour le bénéficiaire
En contrepartie, les sommes perçues sont imposables entre les mains du bénéficiaire selon le régime des pensions alimentaires. Elles doivent être déclarées dans la catégorie des pensions, retraites et rentes.
La conversion de la rente en capital
L'article 276-4 du Code civil permet au juge de substituer un capital à la rente viagère initialement fixée. Dans ce cas, si le capital est versé dans les 12 mois suivant le jugement de conversion, le débiteur peut bénéficier de la réduction d'impôt de 25%.
Cependant, l'assiette de cette réduction fait l'objet d'un calcul particulier qui tient compte :
- Du capital versé au titre de la conversion
- Des rentes déjà versées, revalorisées en fonction de l'inflation
Ce montant est ensuite plafonné à 30 500 euros et ajusté selon une formule de proratisation prenant en compte la part du capital dans le total des versements.
Le cas du décès du débiteur
Au décès du débiteur d'une rente viagère, celle-ci est automatiquement convertie en capital immédiatement exigible, prélevé sur la succession. Ce capital constitue un passif déductible pour le calcul des droits de succession.
Les héritiers peuvent toutefois choisir de maintenir la rente dans ses modalités initiales. Dans ce cas :
- Les versements qu'ils effectuent sont déductibles de leur revenu global respectif, proportionnellement à leur contribution
- Le bénéficiaire reste imposable sur les sommes perçues
Conclusion
Le choix entre prestation compensatoire en capital et rente viagère a des conséquences fiscales importantes qui doivent être prises en compte dans la négociation du divorce.
Le capital offre l'avantage d'une réduction d'impôt pour le débiteur et d'une exonération pour le bénéficiaire, mais implique un effort financier concentré sur une courte période.
La rente présente l'intérêt d'étaler la charge pour le débiteur avec une déduction fiscale complète, mais impose au bénéficiaire une fiscalité moins favorable.
Compte tenu de ces enjeux complexes, il est vivement recommandé de consulter un avocat avant de fixer définitivement les modalités de la prestation compensatoire.
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