La décharge de la solidarité fiscale dans le couple :
ce qu’il faut savoir en 2025.


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Qu’est-ce que la solidarité fiscale ?
Lorsque deux personnes sont mariées ou pacsées, elles forment un foyer fiscal commun : elles déclarent ensemble leur impôt sur le revenu, et leurs patrimoines sont additionnés pour l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). Par conséquent, elles sont tenues solidairement responsables du paiement de ces dettes fiscales. Cela signifie que l’administration fiscale peut réclamer l’intégralité de la dette à l’un ou l’autre, même si celle-ci dépasse la part qui lui revient personnellement.

Que devient la solidarité fiscale après la séparation ?
La séparation du couple n’entraîne pas la fin automatique de cette solidarité. Un ex-époux ou un ex-partenaire de pacs reste donc solidairement responsable des dettes fiscales communes pour la période durant laquelle il existait un foyer fiscal commun. Cette solidarité peut perdurer longtemps après la séparation, s’ajoutant à la charge émotionnelle et financière : il n’est pas rare que l'administration réclame à un ex-conjoint le paiement d’impositions dues par l’autre, y compris en cas de fraude fiscale découverte postérieurement.

Avant 2024 : un dispositif limité de décharge de responsabilité
Jusqu’à récemment, il existait déjà une procédure de décharge de solidarité fiscale, encadrée par l’article 1691 bis du Code général des impôts (CGI). Le contribuable séparé pouvait demander à être déchargé de la dette commune, à condition notamment :

  • D’être effectivement séparé,
  • D’être à jour de ses propres obligations déclaratives,
  • Et que la dette fiscale soit manifestement disproportionnée par rapport à sa propre situation financière et patrimoniale.
Cette décharge n’était donc ni automatique, ni acquise, et de nombreux cas restaient en dehors du champ de la protection, laissant parfois des victimes, notamment de violences ou de fraudes inconnues au moment de la vie commune, dans la précarité.

La loi du 31 mai 2024 (n°2024-494) : une réforme attendue et saluée
Pour garantir une justice patrimoniale plus réelle au sein de la famille, la loi du 31 mai 2024 a modifié l’article 1691 bis du CGI et introduit un nouveau mécanisme à l’article L.247 du Livre des procédures fiscales : la demande de remise gracieuse de la solidarité fiscale.
Ce nouveau droit s’adresse notamment :
  • Aux personnes séparées dont l’ex-conjoint, parfois violent ou fraudeur, a laissé des dettes fiscales dont elles n’ont ni tiré profit ni participé à la formation ;
  • Aux situations où la décharge de solidarité classique (article 1691 bis) est refusée ou n’a pas donné lieu à une décision définitive.
Désormais, il est possible de demander à l’administration fiscale d’être déclarée tiers à la dette et de n’être redevable ni de l’impôt, ni des pénalités, ni des intérêts liés à la fraude ou à l’inconduite de l’autre membre du couple. L’administration dispose d’un pouvoir d’appréciation humaine et individualisée pour étudier ces demandes, prenant en compte la réalité des situations personnelles.

Un bilan déjà positif
En un an, la réforme a démontré son impact :
  • 484 demandes reçues (contre 250-300 avant la réforme),
  • 88 % de décharges accordées, soit plus du double qu’en 2023,
  • 96 millions € de dettes effacées, 1,5 million € remboursés à des ex-conjoints indûment prélevés,
  • 87 % des bénéficiaires sont des femmes, souvent dans des situations fragiles après un divorce ou une séparation.

Quelles démarches pour demander la décharge ?
La nouvelle procédure s’applique à toute personne :
  • Effectivement séparée,
  • À jour de ses obligations fiscales,
  • Dont la demande initiale en application de l’article 1691 bis n’a pas encore abouti à une décision définitive ou judiciaire passée en force de chose jugée au 2 juin 2024.
Il s’agit d’une procédure gracieuse : l’administration examine chaque dossier au cas par cas, avec possibilité de recours hiérarchique et contentieux en cas de refus ou d’absence de réponse sous six mois. Une instruction fiscale détaillée sera publiée à l’automne 2024 pour préciser les modalités d’application.

Les contours de la décharge
  • Pour l’impôt sur le revenu : la décharge porte sur la différence entre la cotisation commune et la part personnelle du demandeur, calculée selon ses revenus et ceux de ses enfants à charge.
  • Pour l’IFI : elle porte sur la différence entre la cotisation commune et la part personnelle de patrimoine imposable du demandeur (y compris une fraction pour les enfants).
  • Pour les pénalités et intérêts : la loi permet désormais la décharge totale sur les intérêts de retard et les pénalités portant sur l’impôt sur le revenu, sous réserve de certaines exceptions pour l’IFI et la taxe d’habitation secondaire.

En conclusion
La réforme de 2024 marque une avancée concrète pour la protection des personnes séparées, particulièrement les femmes victimes de la solidarité fiscale malgré leur séparation, en humanisant la réponse de l’administration fiscale. Il est désormais possible de sortir du cycle dévastateur de la dette fiscale imposée à la suite d’actes dont on n’est ni l’instigateur ni le bénéficiaire. Toute personne concernée est invitée à se rapprocher d’un avocat ou de l’administration fiscale pour examiner sa situation et bénéficier de ce nouveau droit.

















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