Gérer le décès d'un locataire : Procédures et obligations légales du bailleur 

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Le décès d'un locataire constitue une situation délicate pour un bailleur, soulevant des questions juridiques complexes et nécessitant le respect de procédures spécifiques. Cet article vise à éclairer les propriétaires confrontés à cette situation et à présenter les démarches à suivre selon différents scénarios.

La résiliation du bail suite au décès
Lorsqu'un locataire décède, la première chose à savoir est que le bail est automatiquement résilié de plein droit à la date du décès, sans nécessité de donner congé ni de respecter un délai de préavis. Cette disposition est prévue par l'article 14 de la loi du 6 juillet 1989 qui régit les contrats de location à usage de résidence principale.
Cependant, cette résiliation automatique ne signifie pas que le propriétaire peut immédiatement reprendre possession du logement. Différentes situations doivent être envisagées.

Les différents scénarios à considérer

Scénario 1 : Le locataire défunt vivait avec d'autres personnes
Certaines personnes peuvent bénéficier du transfert automatique du bail :

  • Le conjoint survivant ou le partenaire de PACS devient automatiquement cotitulaire du bail et peut rester dans les lieux. Il doit simplement informer le bailleur du décès.
  • D'autres personnes peuvent également demander le transfert du bail si elles remplissent certaines conditions :
    • Les descendants (enfants, petits-enfants) ayant vécu avec le défunt depuis au moins un an
    • Les ascendants ayant vécu avec le défunt depuis au moins un an
    • Le concubin notoire ayant cohabité avec le défunt depuis au moins un an
    • Les personnes à charge ayant vécu avec le défunt depuis au moins un an
Pour bénéficier du transfert, ces personnes doivent en informer le propriétaire, idéalement par courrier recommandé avec accusé de réception, en joignant les justificatifs nécessaires. Le bail se poursuit alors aux mêmes conditions, sans nécessité d'établir un nouveau contrat.
Si plusieurs personnes demandent le transfert du bail, le tribunal tranchera en fonction des intérêts en présence, en tenant compte notamment de la présence d'enfants en bas âge ou de l'état de dépendance des demandeurs.

Scénario 2 : Le locataire défunt vivait seul mais a des héritiers
Dans ce cas, les héritiers doivent :
  • Informer le propriétaire du décès en lui adressant un acte de décès
  • Vider le logement des effets personnels du défunt
  • Payer une indemnité d'occupation équivalente au loyer jusqu'à la restitution des clés
  • Procéder à un état des lieux de sortie
  • Régler les éventuels arriérés de loyer ou de charges
Aucun délai légal n'est fixé pour libérer le logement, mais il est généralement admis qu'un à deux mois sont nécessaires. Un accord avec le propriétaire est recommandé pour fixer la date de restitution des clés et d'état des lieux.
Le dépôt de garantie versé par le locataire sera restitué aux héritiers, après déduction des sommes éventuellement dues au propriétaire (arriérés de loyer, réparations locatives...).

Scénario 3 : Le locataire vivait seul et décède sans héritier connu
C'est la situation la plus complexe pour un bailleur. Bien que le bail soit résilié de plein droit, le propriétaire ne peut pas librement récupérer son logement, ni se débarrasser du mobilier et des effets personnels du défunt restés sur place. Une procédure judiciaire est nécessaire.

La procédure à suivre en l'absence d'héritier

Première étape : Obtenir l'autorisation d'accès au logement
Le propriétaire doit saisir le tribunal judiciaire du lieu de l'immeuble par voie de requête pour obtenir l'autorisation d'entrer dans le logement et de faire évacuer le mobilier. Cette procédure est encadrée par les articles 1324 et 1325 du Code de procédure civile.
Le président du tribunal désignera un commissaire de justice (huissier) qui sera chargé de :
  • Procéder à l'ouverture du logement en présence de témoins
  • Dresser un inventaire des biens présents
  • Superviser le déplacement des meubles vers un garde-meuble ou une partie du logement (garage, cave)
À l'issue de ces opérations, l'huissier fermera les lieux et restituera les clés au propriétaire, qui pourra alors remettre le logement en location ou le vendre.
À noter : les frais liés à cette procédure (huissier, serrurier, témoins, garde-meuble) sont avancés par le propriétaire.

Deuxième étape : La gestion de la succession vacante
Pour pouvoir se débarrasser définitivement des meubles du défunt et tenter de récupérer les frais avancés, le propriétaire doit saisir le tribunal judiciaire afin d'obtenir la désignation du service du Domaine comme curateur de la succession vacante.
Le service du Domaine sera alors chargé de :
  • Dresser l'inventaire de l'actif et du passif de la succession
  • Rechercher d'éventuels héritiers ou comptes bancaires
  • Organiser la vente aux enchères des meubles ou ordonner leur destruction
  • Établir une proposition de règlement du passif de la succession
Pour espérer le remboursement des frais avancés et des éventuels loyers impayés, le propriétaire devra déclarer sa créance au curateur. Toutefois, si la succession s'avère déficitaire, les chances de remboursement sont faibles.

Conseils pratiques pour les bailleurs
  1. Ne jamais pénétrer dans le logement sans autorisation. Seul le curateur ou la personne désignée par le tribunal est habilitée à faire l'inventaire des biens du défunt.
  2. Saisir rapidement le service du Domaine en transmettant toutes les informations utiles concernant le locataire décédé.
  3. Envisager de mandater un généalogiste pour tenter de retrouver des héritiers ou se rapprocher de la chambre des notaires pour savoir si un notaire a été chargé du règlement de la succession.
  4. Documenter toutes les démarches entreprises et conserver les justificatifs des frais engagés.
  5. Consulter un avocat spécialisé pour vous accompagner dans ces procédures complexes.
Les risques en cas de non-respect des procédures
Le non-respect de ces procédures expose le bailleur à plusieurs risques, notamment :
  • Des poursuites pour vol en cas de manifestation tardive d'un héritier
  • Des poursuites pour violation de domicile en cas d'entrée dans le logement sans autorisation préalable

Conclusion
Le décès d'un locataire crée une situation juridiquement complexe pour le bailleur, particulièrement en l'absence d'héritier connu. Les procédures à suivre sont strictement encadrées par la loi et nécessitent souvent l'intervention de professionnels du droit.
Face à cette situation, la patience et le respect scrupuleux des procédures sont de mise. N'hésitez pas à vous faire accompagner par un avocat  qui saura vous guider efficacement dans ces démarches et défendre au mieux vos intérêts.

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